Être femme en Asie de Anne Garrigue

Aux éditions Philippe Picquier, spécialiste de littérature asiatique

« Un être humain sur quatre est une femme asiatique. Il est donc essentiel d’interroger la question des femmes à partir de l’Asie. Qu’avons-nous à apprendre des inégalités hommes-femmes dans cette région du monde, quels problèmes se posent avec le plus d’acuité ? Sommes-nous dans une période de progression du statut des femmes ou bien sommes-nous en train d’assister à un retour en arrière ?
En Asie, les femmes ne vivent pas toutes dans le même espace ni dans le même temps. Que partagent entre elles une riche entrepreneuse chinoise, une mère au foyer japonaise, une paysanne indienne et une ouvrière vietnamienne ?
Ce livre répond à toutes ces questions et fournit un état des lieux documenté, chiffré et complet en matière de santé, d’éducation, d’opportunités économiques et d’émancipation politique. Une enquête passionnante, parfois surprenante, et surtout indispensable, car la place des femmes est plus que jamais un indicateur du degré d’ouverture et de liberté dans les sociétés. »

Être femme en Asie de Anne Garrigue
Quatrième de couverture de l’édition de poche, 2019

Passages relatifs au Vietnam

« L’Asie fait surtout figure de très mauvais élève en matière de répartition des sexes à la naissance. La Chine occupe le dernier rang mondial avec un ratio femme/homme de 0,87, l’Inde le 146e rang avec 0,90 et le Vietnam le 145e rang avec 0,91, alors que le taux qui correspond à une répartition naturelle entre les sexes à la naissance est de 0,94. » p.14

« En Chine, en Malaisie, en Thaïlande, au Vietnam, aux Philippines, au Pakistan, au Sri Lanka et en Mongolie, elles se marient en moyenne entre 23 et 26 ans, au Cambodge et en Indonésie à 22 ans, au Laos à 21 ans, au Népal et en Inde à 20 ans, au Bangladesh à 19 ans. » p.14

« Performance économique des femmes par rapport aux hommes. En douze ans (de 2006 à 2018), la Chine est passée du 53e au 86e rang, et le Vietnam du 11e au 33e rang, comme si le développement remettait en cause les progrès des femmes réalisés grâce à l’égalitarisme communiste. » p.17

« Les pays où la proportion des femmes actives est la plus faible sont l’Inde et le Pakistan. On retrouve des taux élevés pour les trois pays communistes et pour certains pays pauvres, mais il convient de nuancer ces chiffres, car, dans leur cas, l’emploi féminin est essentiellement non salarié, qu’il soit agricole ou non formel dans le secteur non agricole. » p.18

« C’est pour les emplois professionnels techniques que les avancées des Asiatiques sont les meilleures. Dans six pays, elles sont même plus nombreuses que les hommes : Philippines (58/42), Mongolie (65/35), Thaïlande (56/44), Vietnam (54/46), Chine (52/48), Myanmar (61/39). » p.19

« Le profil démographique de l’Asie a dramatiquement changé. En quelques années, le vieillissement et la masculinisation du continent ses sont accélérés, alors que l’écart entre hommes et femmes en matière de santé s’est réduit, sauf dans les régions très pauvres. Après avoir débuté dans les pays les plus développés d’Asie, notamment au Japon, le vieillissement touche désormais les pays émergents, voire les moins avancés. Les taux de fécondité ont fortement baissé en Mongolie et au Vietnam, et les taux de dépendance ont crû rapidement en Chine, en Indonésie et en Thaïlande. Même l’Inde voit son taux de fécondité baisser autour de deux enfants par femme alors qu’il était encore de 5,9 dans les années 1960. Quant à la masculinisation, fermement établie en Chine et en Inde, elle se déplace au Vietnam, alors qu’elle a quasiment disparu de la Corée du Sud. » p.23

« Le Vietnam est fortement touché par la masculinisation : selon le Département général de la démographie et du planning familial, en 2050, la pays devrait connaître un excédent de 2,3 à 4 millions d’hommes. » p.32

« Au Vietnam, la mise en place d’un système de santé pour les plus démunis a réduit les taux de mortalité des mères et des enfants. » p.43

« L’Asie est la zone où les progrès en matière d’éducation des fillettes sont les plus rapides. […] Les filles passent devant les garçons dans l’enseignement secondaire dans une grosse majorité de pays. […] On observe un écart en faveur des filles dans le troisième cycle en Chine, Indonésie, Malaisie, Thaïlande, aux Philippines, Sri Lanka, en Mongolie, Myanmar, Vietnam, Népal et Laos. Un phénomène bien connu qui s’explique par un marché du travail qui paie mieux les hommes et les encourage à partir travailler plus tôt, par le fait que l’homme est en charge de gagner la vie de la famille et par l’environnement scolaire lui-même, qui privilégie les filles, plus “sages” que les garçons dans l’ensemble. » p.50.

« Le recours aux épouses étrangères – Pour pallier le manque de femmes à marier, un phénomène nouveau est apparu au sud de la Chine, notamment dans les provinces frontalières du Yunnan et du Guangdong. Les hommes vont chercher des femmes à l’étranger, surtout des Vietnamiennes et des Cambodgiennes. » p.92

« La violence domestique – au Vietnam aussi, 64 % des femmes entre 15 at 49 ans considèrent un comportement violent de la part de leur mari comme “normal”. » p.99

« Le cycle de la vie active des femmes – La première forme est celle dite du “plateau”, où les femmes s’engagent dans la vie active et s’arrêtent quand elles atteignent la cinquantaine. On la retrouve essentiellement dans les pays passés par le communisme (Chine, Mongolie, Vietnam[1]), où les femmes ont été encouragées à travailler sans s’arrêter et prennent leur retraite tôt. » p.104

« La guerre au Vietnam a elle aussi provoqué une explosion de la prostitution pour servir les besoins sexuels des militaires américains dans des établissements pudiquement baptisés de “repos et récréation”, et quand la clientèle américaine s’est retirée en 1974, elle a été remplacée par celle du tourisme. »

Mais avec le développement économique et les écarts de richesse, le tourisme sexuel intrazone a pris le relais, et les clients sont devenus très majoritairement asiatiques. De Chine, du Vietnam, de Thaïlande, d’Indonésie et des Philippines partent des milliers de jeunes femmes en Thaïlande, en Malaisie, et à Singapour, dans des villégiatures-champignons où elles sont exploitées sexuellement de façon indigne et cruelle. En janvier 1984, un incendie dans un bordel à Phuket a tué cinq jeunes prostituées de 9 à 12 ans alors qu’elles avaient été enfermées et attachées dans leurs chambres pour recevoir des clients jusqu’à onze heures d’affilée, à raison d’un toutes les demi-heures. » p.148.149

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Etre femme en Asie de Anne Garrigue - Anne Garrigue
Journaliste-écrivaine, Anne Garrigue a vécu 16 ans en Asie du Nord (huit ans au Japon, trois ans en Corée du Sud et cinq ans en Chine). Elle a écrit plusieurs ouvrages sur le Japon (Japonaises, la révolution douce, Japon, la fin d’une économie), sur l’impact de l’Asie en France (L’Asie en nous). Elle est rédactrice en chef du magazine bilingue franco-chinois Connexions publié à Pékin.

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L’essai d’Anne Garrigue s’appuie sur des statistiques. Il consacre de nombreuses pages à la Chine, à l’Inde et au Japon. J’ai relevé ci-dessus les passages relatifs au Vietnam.

Régine Hausermann, septembre 2023

[1] En 2006, l’âge de départ en retraite des femmes professeures vietnamiennes était de 50 ans. Il est passé à 55 ans quelques années plus tard.

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